14 août 2019

Un socle de protection sociale pour tou.te.s dans le cadre du centenaire de l'OIT

Chaque année a lieu la Conférence Internationale du Travail (CIT) qui est une institution tripartite qui réunit les États, les Travailleur.euse.s et les Employeurs pour débattre des enjeux liés au travail. Au sein de cette CIT existe une commission d’application des normes. Chaque année, celle-ci a pour mission de vérifier si les Etats-Membres respectent bien les conventions et recommandations de l’OIT. Ainsi, vingt-quatre pays sont appelés à s’expliquer sur l’application de certaines conventions spécifiques.

Avant d’entamer ce travail, une discussion autour d’une étude effectuée par des experts de l’OIT sur des normes spécifiques, appelée "étude d’ensemble", est organisée. Cette année, l’étude portait sur la recommandation n°202 sur les socles de protection sociale.

La recommandation n°202 sur les socles de protection sociale a été adoptée à Genève, lors de la 101ème session de la Conférence Internationale du Travail, le 14 juin 2012. Les socles de protection sociale sont une combinaison de garanties élémentaires de sécurité sociale devant protéger les personnes de la pauvreté, la vulnérabilité et l’exclusion sociale. La recommandation (R202) à ce sujet, approuvée par la Conférence de l’OIT, doit fournir des soins de santé de base et une sécurité de revenu à des millions de personnes.

La moitié de la population mondiale ne bénéficie pas d'une protection sociale

Lors des discussion, les représentant.e.s des syndicats ont identifié plusieurs problèmes de mise en œuvre au sein de la commission. Selon les chiffres de l’OIT, la moitié de la population mondiale n’a pas accès à la protection sociale tandis que l’autre moitié ne bénéficie que d’une protection partielle.

Un des problèmes majeurs reste l’économie informelle. Des témoignages de syndicalistes d’Afrique, Asie et Amérique-Latine soulignent sans cesse le grand nombre de travailleur.euse.s présent.e.s dans le secteur informel.

Ce que nous appelons «  le travail au noir  » est une réalité quotidienne pour 80 à 90% des travailleur.euse.s de ces pays. Ils n’ont pas de contrat de travail, ne sont pas soumis.es au droit du travail et, dans la plupart des cas, ne bénéficient d’aucune forme de protection sociale. Quand elles tombent malades, ont un accident de travail ou perdent leur emploi, c’est un véritable drame pour toute la famille. En plus d’une perte de revenu, ces familles font face à des frais importants pour lesquels il n’y pas d’argent disponible. Pourtant, ces familles vivent déjà dans la pauvreté : les salaires de 2 euros par jour ne sont malheureusement pas une exception.

Les nouvelles formes de travail constituent également un grand défi pour l’accès à la protection sociale, notamment en Belgique. Pensez aux freelancers (qui sont souvent de faux et fausses indépendant.e.s) ou aux travailleur.euse.s de plateformes digitales (Uber, par exemple). Souvent, ni le statut de ces personnes, ni les règles auxquelles elles sont soumis.e.s ne sont clairs.

Appréhender la protection sociale comme un droit humain et non comme un coût

Au sein de la commission, d’importantes divergences d’opinion se sont fait ressentir entre les employeurs et les syndicats quant à la question des pensions. En effet, les employeurs estiment d’une part qu’allonger la carrière serait envisageable et bénéfique tant que l’espérance de vie augmente et d’autre part que le montant des pensions peut également être revu à la baisse. La réponse du côté du banc des travailleur.euse.s ne s’est pas faite attendre : celui-ci a martelé que l’espérance de vie ne s’accroît pas pour tou.te.s les travailleur.euse.s de la même façon, que travailler plus longtemps n’est ni envisageable ni possible pour tout le monde et enfin, qu’une fin de vie digne est un droit fondamental. Ces derniers constats sont renforcés par la stagnation avérée de l’espérance de vie dans des pays comme les Etats-Unis ou le Royaume-Uni, voire par sa diminution pour les travailleur.euse.s ordinaires.

Les avis ont également divergé quant au financement de la protection sociale, au sein de la commission. Tandis que les employeurs sont très friands d’assurances privées, les syndicats veulent principalement un socle de protection sociale financé par le gouvernement et complété, quand cela est possible par des contributions des employeurs et des travailleur.euse.s.

Un syndicaliste du Mali explique que, chaque année, 60 milliards de dollars quittent le continent Africain sans avoir été soumis à une quelconque forme de taxation. Si les grandes entreprises et les plus riches payaient leur juste part d’impôts, toute la population pourrait bénéficier d’une protection sociale. Imposer les personnes les plus pauvres par peur de se tourner vers les entreprises n’est certainement pas une stratégie adéquate… et est en plus peu rentable !

Le représentant de l’autorité Belge, Paul Soete, nous fait part de l’analyse suivante :

« L’investissement dans la protection sociale stimule la croissance et la stabilité économiques et améliore la performance des économies nationales, permettant d’obtenir des sociétés à la fois plus équitables et plus cohérentes. Trop souvent, on oppose le social et l’économique alors que la filiation entre les deux est évidente. »

Ainsi, investir dans la protection sociale favorise la stabilité économique.

Katrien VERWIMP, Coordinatrice du service Plaidoyer et Recherche de Solidarité Mondiale (WSM)

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