6 avril 2020

Le COVID-19 touche de plein fouet le secteur de l'habillement

Le coronavirus a atteint un niveau de pandémie mondiale et touche les populations du monde entier. Parmi elles, les travailleur-euses des filières d'approvisionnement mondiales en vêtements. En temps normal, ces travailleur-euses vivent déjà dans des situations précaires. Sans capacité d’épargne, ni sécurité sociale, ces dernier.ère.s doivent actuellement affronter une crise sanitaire, sociale et économique majeure. "Les marques de vêtements doivent contribuer aux compensations des travailleurs et travailleuses de l'habillement", déclare Kong Athit, président du syndicat cambodgien de l'habillement C.CAWDU, partenaire de WSM et de la CSC.  En effet, le devoir de diligence impose aux marques et enseignes de s’assurer du respect des droits humains des travailleur.euse.s tout au long de leurs filières d'approvisionnement.


Les travailleur.euse.s ne courent pas seulement le risque de tomber malade, mais aussi celui de perdre leur emploi, face à la baisse drastique de la consommation en Europe et aux Etats-Unis. D'autres pays ferment aussi des usines pour empêcher la propagation du virus.

Des fermetures d'usines ont été signalées au Sri Lanka, au Bangladesh, en Indonésie, en Albanie et en Amérique centrale. Pour les travailleur.euse.s de l'habillement, qui vivent déjà dans une grande pauvreté en raison des salaires extrêmement bas dans le secteur, c'est un désastre s'ils/elles ne sont pas payé.es. Ils/elles n'ont pas d'économies sur lesquelles s'appuyer. "Les travailleur.euse.s de l'habillement vivent au jour le jour. Si ils ou elles perdent leur emploi, c’est leur salaire mensuel qui sera perdu et avec lui la possibilité de nourrir leur famille.", déclare Kalpona Akter, présidente de la Fédération des travailleurs de l'industrie de l’habillement du Bangladesh. "Lorsque des travailleurs du secteur de l'habillement sont licenciés, les marques de vêtements doivent veiller à ce que les travailleurs reçoivent l'intégralité de l'indemnité de licenciement qui leur a été légalement accordée".

Pas de travail, pas d’argent!

Ces fermetures sont dues à l’arrêt de l’approvisionnement en matières premières en provenance de Chine, à la réduction des commandes liées à la fermeture des magasins, notamment en Europe, ainsi qu’aux initiatives prises par les gouvernements pour des raisons de santé publique. Cela touche un certain nombre de pays tels que : le Cambodge, le Myanmar (Birmanie), le Sri Lanka, le Bangladesh, l'Indonésie, l'Albanie et les pays d'Amérique centrale.

Selon les rapports des médias et ceux en provenance du réseau international d’achACT, la Clean Clothes Campaign, la situation est particulièrement grave au Cambodge et au Myanmar. Environ 10% des usines de vêtements de la région de Yangon au Myanmar sont maintenant temporairement fermées et les travailleur.euse.s de l'habillement n’y sont plus payé.es. Au Myanmar, les employé.e.s reçoivent une indemnité de licenciement si la fermeture de l'usine dure plus de trois mois. L'indemnité de licenciement elle-même ne représente qu'une moitié de salaire mensuel par année de travail enregistrée dans une usine, après une période d'essai de six mois. Mais de nombreuses usines n'ont démarré qu'au cours des cinq dernières années, et la rotation des ouvrier.ères est très élevée. Une grande majorité de travailleur.euse.s n'ont donc plus rien.

Cambodge et Indonésie : licenciements massifs sans indemnisation

La situation au Cambodge est tout aussi préoccupante: des dizaines de milliers de travailleur.euse.s de l'habillement pourraient perdre leur emploi dans les semaines à venir. Kong Athit, président de C.CAWDU, partenaire de WSM et de la CSC, a déclaré que le 26 mars, dix des usines où travaillent des membres étaient déjà fermées. Au total, 21.000 employé.es y travaillent. Selon la loi cambodgienne, les employeur.euse.s doivent payer 40% du salaire minimum mensuel de 190 dollars en cas de fermeture temporaire. Le gouvernement y ajoute 20%. Les syndicats cambodgiens revendiquent que les marques internationales de vêtements participent également en versant 20% supplémentaires. 

Cependant, certaines usines ont suspendu des travailleur.euse.s sans autorisation. Nombre d’entre eux/elles sont déjà endettés et empruntent pour compenser les insuffisances de leurs bas salaires. Ils/Elles se trouvent maintenant dans une situation où ils/elles ne peuvent pas débourser les mensualités dues risquant de perdre la terre familiale mise en gage du prêt.

En Indonésie aussi, on compte de nombreux cas de licenciements sans aucune forme de compensation. Ary Joko, président de la centrale syndicale GARTEKS, partenaire indonésien de WSM, le confirme: « Nous avons déjà perdu de nombreux membres de cette manière. Ils doivent prendre soin de leur famille, de leurs parents souvent aussi. Que peut-on faire pour eux ? » Joko craint que de nombreux militant.es syndicaux ne puissent pas retourner au travail lorsque les usines rouvriront.

Le devoir de vigilance des multinationales en temps de corona

Leur devoir de diligence impose aux marques et enseignes de s’assurer du respect des droits humains des travailleur.euse.s tout au long de leurs filières d'approvisionnement. Et cela, même en temps de crise.

Les travailleur.euse.s du secteur de l'habillement doivent pouvoir travailler en toute sécurité. Cela signifie que les fournisseurs doivent se conformer aux dispositions des gouvernements en matière de distanciation sociale afin de protéger les employé.es contre la contamination. Toutefois, il est important aussi de ne pas limiter de trop la capacité à s'organiser en syndicat.

Les employé.es qui ont contracté le virus ou qui présentent des symptômes doivent pouvoir prendre un congé de maladie sans conséquences négatives. Pendant la période de rétablissement et d'auto-confinement, ils/elles doivent recevoir leur salaire régulier complet. S'ils/elles sont renvoyé-es chez eux en raison d'une pénurie de travail, les travailleur.euse.s de l'habillement doivent continuer à recevoir leur plein salaire régulier. Lors de la réouverture des usines, les délais de livraison devraient être revus pour éviter les heures supplémentaires obligatoires pour rattraper les retards.

En bref : le virus corona a également un impact majeur sur l'industrie de l'habillement. Il est important que les travailleur.euse.s de l'habillement n'en souffrent pas.

Avec achACT et son réseau international, nous demandons instamment aux marques internationales de prendre immédiatement des mesures proactives pour protéger les travailleur.euse.s qui fabriquent leurs vêtements contre les répercussions de cette pandémie mondiale. Elles doivent veiller à ce que ces personnes qui ont rendu leurs importants profits possibles grâce à des emplois sous-payés et non protégées ne portent pas le fardeau financier de la crise industrielle actuelle.

 

Crédit photos : Athit (FB CCAWDU), Kristof Vadino.

 

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